Un an après la loi de protection des enfants, l’ancien secrétaire d’État en retient plusieurs progrès, mais aussi quelques regrets. Il espère des décrets pour l’interdiction des hôtels et pour les normes d’encadrement minimales dans les établissements.
Avec le recul, quelles sont les principales avancées que vous retenez de la loi du 7 février 2022 ?
Adrien Taquet Cette loi n’était qu’une brique d’une Stratégie nationale plus large, avec les contractualisations avec les départements, notamment. J’ai un grand respect pour le Parlement mais la loi ne peut pas tout. Beaucoup relève des pratiques professionnelles et des formations, plus difficiles à changer.
Cependant, chemin faisant, on s’est rendu compte de la nécessité de normes législatives. Personne n’y croyait, mais la loi a finalement été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Tout le monde a alors dit que c’était une petite loi. Et au final, tout le monde s’accorde à dire qu’il y a un certain nombre d’avancées majeures.
Lesquelles ?
A. T. Je pense à l’article 1 (qui impose au juge confiant un enfant d’évaluer l’opportunité de choisir un tiers digne de confiance, NDLR). Assez peu de gens l’ont relevé, mais il a un vrai effet transformatif sur notre système, qui est globalement trop institutionnalisé dans notre pays – que ce soit sur le handicap, ou l’aide sociale à l’enfance, où l’on place beaucoup plus que dans d’autres pays, comme l’Allemagne.
Lorsque j’étais au ministère, un tiers des courriers que je recevais venait de proches, qui me disaient ne pas comprendre le placement d’un enfant dont ils auraient pu s’occuper !
Certains disent qu’on a fait ça pour économiser de l’argent. Mais c’est une vision politique que je portais : il faut désinstitutionnaliser nos systèmes de protection. C’est aussi dans ce but que nous avons encouragé le recours aux parrains et aux mentors.
Même si la famille peut être un lieu de violences, elle reste le premier cercle de protection autour de l’enfant. Et s’il y a des problèmes, le deuxième cercle de protection doit être la famille élargie. L’institution n’est que le troisième cercle.
Comment les juges se saisissent de cette désinstitutionnalisation ?
A. T. Cette obligation d’évaluer systématiquement s’il y a possibilité de mettre un enfant auprès d’un tiers digne de confiance implique certaines modifications de pratiques, en amont chez les travailleurs sociaux et les juges, et en aval sur le contrôle régulier. Cela nécessiterait de se mettre autour de la table pour réfléchir à tout ce que cela implique et pour partager les bonnes pratiques. France enfance protégée pourrait en être le lieu.