La loi de réforme pour la justice du 23 mars 2019 autorise la création d'un code de justice pénale des mineurs et met en place de nouvelles modalités de prise en charge des jeunes délinquants (mesure éducative d'accueil de jour, accueil temporaire en CEF...).
Au terme d’une gestation de près d’un an, la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a été publiée au Journal officiel le 24 mars 2019. Parmi les 110 articles qu’elle contient, une disposition a beaucoup fait parler d’elle : l’article 93, qui autorise le gouvernement à réformer par voie d’ordonnance la justice pénale des mineurs et à créer un tout nouveau code dédié à ce sujet.
Dans le même temps, le législateur procède à de nombreuses modifications de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. Comme l’explique la directrice de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) dans une circulaire du 25 mars 2019 présentant la réforme, la garde des Sceaux a décidé, « dans un contexte d’augmentation sensible du nombre de mineurs incarcérés, […] de renforcer la réponse éducative afin de développer les alternatives à l’incarcération, de mieux accompagner les mineurs délinquants, et de réaffirmer que la détention provisoire d’un mineur doit être prononcée en dernier recours ».
La circulaire évoque l’ensemble des mesures spécifiques aux mineurs délinquants, d’ores et déjà applicables, et comporte quatre annexes qui en explicitent certaines : la mesure éducative d’accueil de jour, l’accueil temporaire dans le cadre d’un placement en centre éducatif fermé (CEF), les dispositions relatives au placement pénal et celles relatives aux mesures de sûreté.
1. Code de justice pénale des mineurs
Cadre juridique illisible
Actuellement, les dispositions relatives à la justice pénale des mineurs résultent de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante et, dans le silence de celle-ci, du code de procédure pénale. Modifiée à 39 reprises, l’ordonnance de 1945, selon les termes de Nicole Belloubet au cours des débats en séance, « s’est complexifiée et a perdu de sa cohérence ». Peu compréhensible pour les mineurs et leurs familles, « difficilement utilisable par les professionnels du droit », elle est en décalage avec l’évolution de la délinquance des mineurs.
Une refonte de l’ordonnance est ainsi apparue nécessaire aux yeux du gouvernement, qui a fait le choix, pour cela, de la réforme par ordonnance.
Nouveau code spécialisé
L’objectif de la future ordonnance est de regrouper, dans un nouveau « code de la justice pénale des mineurs », les dispositions relatives à la justice pénale des mineurs qui auront été, dans le même temps, modifiées – dans le respect des principes constitutionnels applicables et des conventions internationales – afin de :
- simplifier la procédure pénale applicable aux mineurs délinquants ;
- accélérer leur jugement pour qu’il soit statué rapidement sur leur culpabilité ;
- renforcer leur prise en charge par des mesures probatoires adaptées et efficaces avant le prononcé de leur peine ;
- améliorer la prise en compte de leurs victimes.
Cette refonte ne doit toutefois pas remettre en cause les principes essentiels de la justice des mineurs, précise la garde des Sceaux. À savoir : l’âge de la majorité pénale, le principe d’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs, la « double vocation du juge des enfants, à la fois juge des mineurs en danger et juge des mineurs délinquants », ainsi que la prééminence des mesures éducatives.
Les travaux de réforme de la justice pénale des mineurs devraient s’appuyer sur les conclusions de deux rapports parlementaires publiés ces derniers mois : l’un signé de deux sénateurs (mission d’information sur la réinsertion des mineurs enfermés, septembre 2018), l’autre de deux députés (mission d’information sur la justice des mineurs, février 2019).
Entrée en vigueur
L’ordonnance devra être publiée d’ici le 24 septembre 2019. Puis, un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans les 2 mois. Nicole Belloubet propose par ailleurs de ne faire entrer en vigueur l’ordonnance qu’un an après son adoption par le conseil des ministres, afin de « laisser au Parlement la possibilité de jouer pleinement son rôle ».
2. Alternatives à l'incarcération
Plusieurs mesures visant à diversifier les modes de prise en charge des mineurs délinquants sont portées par la loi.
L’objectif, précise la circulaire, est de « mieux individualiser l’action éducative », favorisant ainsi l’insertion des jeunes et la prévention de la récidive.